
Design kanak
Rares sont les expositions qui mettent à l’honneur le design. La discipline, qui allie approche fonctionnelle et esthétique, se décline dans tous les domaines de l’activité humaine : les espaces, les messages (visuels et sonores) ou encore les produits.
Dans son activité de designer graphique, Pascale Géry créé des objets du quotidien, des logos, des visuels, à partir d’une réflexion symbolique.
La frontière est souvent poreuse entre l’art et le design car tous deux font appel à une sensibilité dans le travail des formes, des couleurs, de la lumière, des matières ou des sons. Pour l’artiste héritière d’une double culture kanak et européenne, « le design est la conception, le traçage d’une « ligne » graphique et artistique d’un pays, d’une culture, d’une influence et des codes sociaux et environnementaux. »
Ainsi reformule-t-elle les expressions graphiques pré existantes du design kanak : cases, flèches faîtières, chambranles, gravures des poteries lapita, ou dessins rectilignes des bambous gravés. Pascale Géry trouve sa source créatrice tant dans la symbolique de ces signes tangibles de culture que dans leur forme. La verticalité, revient sans cesse, en écho à l’aïkido qu’elle pratique et enseigne. Un art de l’ancrage, et de la maîtrise de soi qui imprègne également sa création. On retrouve cette influence dans son travail autour de la typographie, qu’elle conçoit dans la sobriété du tracé, inspirée par certaines formes d’écritures asiatiques.
Métissage de sensibilités
Mingöming la qëmek, qu’elle traduit par « le nouveau beau visage (du design kanak) », exprime sa sensibilité métissée à travers la cohabitation d’esthétiques à priori aux antipodes, mais fondamentalement complémentaires. L’artiste parvient à marier le raffinement des lignes épurées du design graphique à la douceur et la rondeur des dessins. Depuis dix ans, elle développe en effet une expression artistique plus personnelle, dans un style naïf, à travers les Umameks, de joyeuses créatures imaginaires dont la forme s’inspire des cases. À travers cet univers empreint de poésie et d’humour, Pascale Géry désacralise le monde des esprits, de l’invisible, si prégnant dans la culture kanak, en le rendant accessible. Il représente en même temps un moyen de parler de ses mondes intérieurs, de manière totalement spontanée, en assumant sa part de douceur et de bienveillance. C’est un peu sa maison intime, d’où le nom qui provient de Uma ne hmeköl en langue drehu (de l’île de Lifou) : l’endroit où l’on dort, et plus généralement la case.
Pour celle qui se définit comme non conventionnelle, cette exposition est l’occasion de faire le lien entre ses deux facettes artistiques et créatives, en proposant une écriture innovante et contemporaine du design kanak.
