
Avec Kanaka, Lemi Ponifasio s’installe directement dans le quotidien « des gens », au cœur de la vie et de la ville. Accompagné de sa technicienne lumière fétiche, Helen Todd, Lemi Ponifasio s’est rendu à Lifou pour y retrouver des artistes des districts du Wetr, de Gaïtcha et de Lössi pour un travail commun. Il effectue un casting sur le tas, au fil des répétitions, pour réduire l’effectif sur scène à une dizaine d’interprètes. À leurs côtés, et pour une expérience inédite, Lemi accueille tous les habitants de drehu qui ont voulu prendre part à cette recherche artistique et communautaire. Beaucoup de mystères autour de cette création en cours, qui se construit chemin faisant et s’attache à « dire le vrai », « Mau » en samoan, du nom de la compagnie de l’artiste.
Vers l’émergence d’un nouveau genre artistique ?
Rien ne sera encore achevé à l’issue de cette première étape de travail, qui concourt à mettre en lumière l’étendue des compétences des artistes. Lemi accorde le même intérêt à toutes les expressions artistiques et laisse l'alchimie se créée in situ. Ni totalement œuvre chorégraphique – encore moins réduite à un style, traditionnel, hip hop, contemporain… –, ni vraiment théâtre. L'objectif est que le public se questionne sur sa propre existence, qu'importe le médium. Pionnier du développement d’une scène hybride théâtre/danse du Pacifique, le metteur en scène accompagne les artistes kanak dans une réflexion entamée de longue date, avec entre autres, les ambitions culturelles de Jean-Marie Tjibaou et le festival Melanesia 2000 : comment se montrer ? Que donner à voir ? Donner la possibilité aux artistes de s’interroger sur ces termes, c’est aussi donner la capacité au public de se voir, d’entamer une introspection qui prendra autant de formes qu’il y aura de spectateurs. Chacun observe les artistes s’intégrer dans un cosmos bien plus profond que le simple espace scénique dans lequel ils évoluent. Tout n’est qu’architecture de lumières et de sons, propre à la construction d’une porte onirique ouverte vers l’inconscient, que chaque regardeur emprunte à sa guise. Inclassable, dérangeant dans sa frontalité, miroir d’un réel souvent occulté par bienséance, l’œuvre de Lemi Ponifasio est difficilement descriptible en des termes occidentaux. Très fortement engagé auprès des communautés autochtones du Pacifique, il offre à ces populations une nouvelle forme d’expression mieux adaptée à leur réalité sociale, créative, rituelle et cosmogonique, dont on espère que les artistes impliqués dans Kanaka pourront se saisir.
Vers l’export
Internationalement reconnu, Lemo Ponifasio a fait surgir ses créations sur les plus grandes scènes mondiales (Théâtre de la ville de Paris, Biennale de Venise, centre culturel Lincoln de New-York, Musée du Louvre de Dubaï…). En 2020, il sera le directeur artistique invité du festival de l’Auckland Art festival, en charge de sa programmation et annonce déjà la présence de Kanaka dans cet événement phare de la scène Pacifique.
De plus, une version propre à être diffusée en salle sera adaptée en 2019.
* Projet soutenu par le Poemart en vue de son fort potentiel à l’export.
Distribution des représentations de novembre 2018
Alexis Banukone, Noël Draikolo, Ulrich Draikolo, Claudy Holue, Salatr Hoane, Rémy Hnaije, César Hapie, Issaganya Ipunessö, Maël Side, Marc Thihmana, Viryhoa Tetuanui, Wally Tetuanui, Bertrand Ukajo, Ambroise Waete